juin 2022
—  @Andrea Helland & @Ash Monroe

Esprit fermé depuis que l'autre de la Nature a débarqué pour faire sa grande annonce, aucune pensée aucun sentiment ne s'infiltre dans celui de mon sublime. La croyance d'une mauvaise blague dissipée, je me suis murée dans un silence inhabituel pour Ash. Je dirais même que c'est une première. Ma maîtrise constante et sans pareille, envolée. Ma froideur, amplifiée. Ma raison, bouffée par des sentiments étrangers que je rejette en bloc. Submergée par un flot continue de questions qui n'ont jamais eu leur place dans ma tête ; d'où je viens, mes origines, ma famille, biologique s'entend. Les circonstances menant à l'adoption par celui qui fut mon père, suffisantes pour toute réponse. Il était loin de la figure paternelle idéale, mais il a eu le mérite de se montrer présent un minimum, quelques temps, le temps de me sauver, de passer le relai malgré lui à ce groupe dysfonctionnel d'enfants des rues, à Wig.

Coupure abrupte de ce lien qui nous uni avec Ash, le besoin soudain, nouveau, inconnu, de solitude. D'être seule, la seule. De ne pas avoir cet autre individu qui rejoindrait comme par magie ceux que je qualifie de famille, ceux que j'ai choisi. Infecte j'ignore l'inquiétude de celui que je considère ma moitié, chamboulée plus que je ne suis en mesure de l'accepter par ce Viggo. J'intime Ash de rentrer, de me laisser tranquille pour une fois. Des mots que je siffle, que je n'aime pas lui prononcer mais ca, il ne peut plus le ressentir. Aucun choix ne lui est laissé. La nouvelle de ce frère me met à vif et si habituellement je partage absolument tout avec Ash, une barrière s'est cette fois érigée. Enfermée dans mon bureau, je me noie alternativement dans le travail et les verres trop nombreux. Jusqu'à ce que le second ne me permette plus d'avoir l'esprit suffisamment clair pour réaliser le premier. Sûrement d'ailleurs que j'ai trop tiré, surestimé ma sobriété et que les derniers documents remplis devront être repris et corrigés. L'avantage, si on peut oser donner ce terme à l'alcoolisme, c'est que ca me couche rapidement. Je ne vois même pas le soleil se lever alors que les nuits se raccourcissent.

Même pas la foi de rejoindre un lit, je me suis assoupie sur le divan, préférant ne pas mettre un pied hors du bureau. Si j'avais pris soin de verrouiller à clef, il y a pourtant cette main douce qui vient me réveiller. Et il n'y a que deux personnes en mesure de pénétrer en ce lieu. Ash et… Drea. Si une seconde je suis contente de lae voir, car c'est toujours le cas, je réalise ensuite bien rapidement la raison de sa présence. Mal de crâne monumental, bouteille vide observée sur le bureau, je n'ai même pas le temps de penser que tout ca n'était qu'un rêve, trop vite rattrapée par la réalité. Je me redresse un peu déséquilibrée, encore dans les vapes, maquillage et robe de la veille toujours en place. Même mes talons sont restés collés à mes pieds. Non mais sérieusement. < Bonjour Andrea. > Le ton se fait agacé, bien plus à mon encontre qu'à la sienne et je souffle doucement, exaspérée sans pour autant m'excuser. < Merci d'avoir fait si vite. > Je me saisis du dossier entre ses mains et file vers la sortie, entrelaçant mes doigts aux siens pour l'entrainer avec moi. < On va retrouver Ash au Babysugar. … > Phrase terminée et pourtant l'air en suspend, les mots refusent de sortir, d'expliquer que j'ai pas tant bien géré la situation. Bien que ca semble évident.

Conduits par mon chauffeur personnel, la route ne prend que quelques minutes. Le dossier de l'enquête toujours scellé dans mes mains, telle une boîte de Pandore. < Qu'as-tu à me raconter Drea ? > L'envie transpirante de penser à autre chose. De parler de tout, sauf de la raison de sa présence. Un évitement peu commun. Au moins le temps d'aller retrouver Ash dans sa chambre et de le réveiller…

juin 2022
—    @Snefrid Myklebust  & @Ash Monroe

Les yeux fermés, je me concentrais une dernière fois sur la voix qui parlait, parlait... ça faisait facilement dix minutes qu'elle égrainait les informations, invitait à se concentrer sur telle ou telle partie du corps. Les pieds, les mains, la poitrine, la respiration était essentielle, et il fallait laisser, au moins une fois, aller. Lâcher prise, laisser son esprit vagabonder dans les méandres d'une âme beaucoup trop en bordel. Il me faudrait toute ma concentration, toute ma tête pour survivre à cette journée, et la méditation m'avais toujours aidé. Là où, actuellement, je m'étais beaucoup reposé sur Az, j'avais décidé de, pour une fois, ne compter que sur moi. Je sentais mon tapis de yoga sous moi, ma main caressait la texture du tapis. Une fois la séance terminée, je m'étais glissé dans un jeans gris et avais enfilé une chemise sombre à imprimé. Ainsi, on pouvait voir de multiples planètes multicolores bordées d'une floppée d'étoiles. J'avais passé une main dans ma tignasse, enfilé quelques bijoux. Un bracelet bleu, d'autres, en tissus et cuirs grignotaient mon autre poignet. Autour de mon cou pendait une lune sur laquelle était gravée une rune. J'avais enfilé une chevillière, afin de limiter la casse. Mon entorse n'était pas encore totalement soignée, et fallait dire que j'avais tendance à clopiner plus qu'à galoper ces derniers temps. J'me tournais une nouvelle fois vers la chambre, me contentant de laisser un p'tit post it avec quelques mots destinés au proprio, avant de filer jusqu'au coin où travaillait Ness, elle m'avait envoyé quelques messages, et je devais m'avouer inquiet.

J'étais donc entré, une pochette sous le bras, un sac de croissant coincé sous le bras, et deux chocolats chauds dans des gobelets en cartons que j'avais choppé en passant au café du coin, dans son bureau, tombant sur une masse amorphe sur le canapé. Son délicieux visage me semblait in brin anxieux, pas serein du tout. J'm'approche donc du canapé avec la boisson chaude, me laissant tomber sur la table basse. Lui caressant doucement la joue.

"Bonjour Trésor, il est l'heure de te réveiller, tu as assez dormi." Je passais les doigts dans sa crinière blonde. Cette surnaturelle avait été à l'époque ma sublimatrice. Même si nous n'étions plus liés, cela ne changeait rien à l'affection que nous nous portions. "Je suis toujours une flèche, tu le sais ça." Elle choppe le dossier, et j'suis obligé de clopiner derrière elle. "Bon... Bon... Va pour le babysugar... Mais fais moi le plaisir de manger quelque chose ! Commencer une journée avec le ventre vide c'est jamais bon pour la santé. Et puis bois un peu, ça te fera du bien !"

Je sens alors sa main douce, fraiche, se glisser contre la mienne, et nos doigts s'enlacent, comme si c'était une vieille habitude. Comme si c'était "comme avant". Mais c'est pas le cas. C'est plus le cas. Le temps n'étouffera cependant pas tous ces souvenirs. Une fois dans la voiture, j'lui tends, autoritaire, pour une fois, la boisson et son p'tit dej. Avant de passer maladroitement ma main dans mes cheveux face à cette question.

"Des tas de choses. ça fait longtemps qu'on s'est pas vus comme ça toi et moi, et j'ai presque été content que tu m'aboies dessus au téléphone mon chou." Et c'est un sourire complice qui étire mes traits. "J'te jure pour ma défense que c'est pas moi qui me suis occupé du dossier, et que j'ai pas pour habitude de marcher sur les plates bandes de mes pairs, sinon je te l'aurais dis. Mais la personne est sérieuse. Le dossier est complet et documenté." Je secoue doucement la tête.

"Sinon... Par où commencer ? J'ai failli finir bouffé par un dragon, j'ai toujours pas totalement récupéré !" J'montre ma cheville. "Entorse. C'est chiant." J'fais comme si c'était banal, comme si ça me coulais dessus. Mais... La réalité était autre. Je détourne les yeux, mes joues se colorant déjà d'un rouge rosé. "J'ai... Heu... je crois que je sors officiellement avec Aznar aussi." J'aurais envie de tripoter ma chemise, les boutons, je me contente de me raccrocher à la texture des sièges, du cuir. C'est confortable. "Il... On... Bon ok ça se voyait comme le nez de la figure que je crushais sur lui mais... Il est tellement..." J'secoue la tête. "Je sens qu'il est fiable, il est rassurant, il est... Juste lui et ça m'suffit." J'plonge ces deux billes d'onyx dans ses prunelles, j'soutiens son regard. Un long moment. "Ness. On est amies depuis combien de temps, toi et moi ? Tu veux en parler ? T'as l'air perdue dans une tempête là. Mais t'es pas seule." J'lui prends doucement la main. "J'serais toujours là pour toi, et t'as aussi l'meilleur des gaillards pour veiller sur toi tu sais, Ash te lâchera pas. On est là ma belle." Et il ne fallut que peu de temps pour arriver à destination. En un rien de temps, l'hôtel était déjà en vue.

juin 2022
—  @Andrea Helland & @Ash Monroe

Contrainte par cette autorité nouvelle que m'adresse Drea, je dois vraiment paraître à côté de mes talons… Je saisis ce croissant et ce chocolat chaud foutus dans mes mains. Si les gestes se font à contre-cœur, que le râlement pour un café est retenu, je ne me fais pas prier pour croquer et boire ces offrandes. J'ai à peine haussé le ton, je pense pour moi-même, ne prononçant pas ces mots dont la vérité est toute autre. Me contente de cette complicité qui ne nous a jamais quitté, un mince sourire aux lèvres. C'est au moins ca qu'il arrive à tirer de mon humeur assassine. Comme lui j'enchaîne, suis son allure toujours précipitée. < Je sais. > Je souffle bien rapidement à Drea pour le rassurer tandis qu'il se défend de son implication dans ces recherches l'ayant amené à moi. Sans que je ne sache réellement les détails de comment s'est déroulée cette affaire, j'ai pleinement confiance en lui. S'il y avait pris part, il m'en aurait informé ; de ca je n'en ai aucun doute. Dès qu'il commence à évoquer précisément le dossier ceci dit, j'agite une main silencieuse pour l'intimer de passer à autre chose. Sujet soigneusement cloisonné dans un coin de mon esprit.

Le regard porté à sa cheville encore protégée, je me sens un peu piteuse, chose peu anodine. < Oh, c'est vrai… Je suis désolée, de ne pas avoir été plus présente pour toi. > Et je pourrais lui sortir tout un tas d'excuse, vu le nombre de problèmes auxquels doivent faire face notre Caste, Senja, complétés par la gestion courante du Red Bed. Cependant, Drea est de ces personnes pour qui aucune excuse ne sera jamais suffisante. Une main douce posée en une caresse sur son bras pour maigre réconfort, je l'écoute m'avouer la véritable nouvelle. < Tu m'en diras tant… > Je lui glisse en un petit sourire, pas franchement surprise. Il était plutôt temps, que ces deux-là se rapprochent. Ils devaient bien être les derniers au fait de leur attraction mutuelle. < Il est fiable pour toi, oui. > En ces mots il n'y a rien d'hautain, seule une véritable tendresse que le dénouement de leur relation soit enfin arrivé. Le constat évident qu'Aznar semble être la personne qu'il lui faut. Celle réussissant à le combler, le rassurer, contrebalancer ses émotions si fortes et si belles.

Drea rapporte la conversation sur ce sujet sensible qui nous rassemble présentement, ses iris accrochant les miennes. Un < Plus tard. > lâché sèchement pour toute réponse à ses questions tandis que notre véhicule s'arrête devant l'hôtel. Son regard toujours soutenu, je n'en dévie pas. Sûrement plus parlant que d'autres mots. Avec ses années de pratique, Drea peut y lire qu'il sera inutile et déconseillé de pousser. Et que ca ne va pas. Autant vis-à-vis de cet étranger, que vis-à-vis de Ash. Que cette situation me déstabilise clairement et de ça, je suis loin d'y être accoutumée. Descendant de notre voiture, le dossier glissé sous mon bras telle une bombe à retardement, je nous entraîne dans les étages jusque la chambre d'Ash, la certitude de l'y trouver. Si notre lien peut sembler rompu, il n'est que drastiquement atténué et je sens la présence de Ash non loin dans les étages. < Et donc, vous avez discuté ? Comment ca c'est passé ? Ce n'est pas le moment de te montrer avare en détails Andrea. > Je le somme dans une remontrance à la tonalité légère, surtout en demande de divertissement. Et oui, la curiosité dévorante.

Clef tournée dans la serrure, je sais qu'à l'instant où je nous fais passer ce seuil, je dépasse une limite. Tacite, toujours respectée, de lui laisser son espace. Si je l'ai forcé à l'isolement, j'empiète sans vergogne. Je tire légèrement un des rideaux et nous installe sur son canapé, balance la pochette des mystères sur la table basse comme si elle était devenue brûlante, écoute Drea me raconter ses histoires. Ash nous rejoindra de lui-même. J'enchaîne les bourdes, j'en ai conscience sans pour autant agir en conséquence. Un sentiment d'autodestruction naissant, incapable d'absorber cet élément nouveau qu'est ce Viggo.

Le silence qui fait tant de bruit et l'étourdit. Seul pour la première fois depuis qu’ils ont passé ce pacte, qu’ils se sont liés pour l’éternité. En colère aussi, comme probablement jamais auparavant. Ce sentiment détestable, de n’être que le larbin dont elle avait besoin. Chaque minute, il se demande ce qu’il s’est passé, pourquoi elle s’est permis de rompre leur pacte tacite. Leur position n’est pas égale, il le sait pertinemment, mais l’homme a cru jusque là qu’ils étaient différents, qu’elle au moins, le pensait son égal. Force est de constater qu’il n’en est rien, alors qu’il est là, dans sa chambre, avec pour seule compagnie ses idées noires. La fureur ne le quitte pas, même s’il s’efforce de la dissimuler au mieux. Fierté malhabile qui s’invite et le pousse à se montrer indifférent face à ce maelstrom évident qui l’assaille. L’homme veut hurler, casser des choses et se cacher sous sa couverture sans bouger un muscle. Ce qu’il fait d’ailleurs depuis plusieurs heures maintenant. Le sommeil n’est pas là, ne veut pas s’inviter et l’emmener avec lui. Eveillé, il gamberge d’autant plus, maugréant et détestant cette situation qu’il ne comprend pas.

Aussi lorsque le bruit d’une clef se fait entendre, il hésite une seconde. Soit à se lever pour utiliser sa force physique pour la forcer à rester dehors et refermer la porte… Soit à rester là, dissimulé derrière ce tissu pour faire semblant de dormir. Si la première option semble la plus satisfaisante, la plus logique aussi, il préfère néanmoins rester couché, pour maîtriser un peu mieux la situation, se sentir moins perdu aussi peut être… La colère se pointe d’ailleurs un peu plus intensément, chaque seconde un peu plus alors qu’elle dépasse toutes les limites, tout ce qu’ils avaient décidé de créer pour rendre leur sublimation unique. Tout semble bafoué à cet instant aussi il grogne, fortement, pour que les deux invités indésirables puissent l’entendre et comprendre qu’il ne veut pas d’eux dans son antre. La lumière entre un peu dans la pièce, tout comme le sentiment insidieux de n’être que l’objet dont elle n’avait pas besoin mais dont elle retrouve soudainement l’utilité.

Cruel, perfide, il s’infiltre dans chaque parcelle de son corps, jusqu’à le rendre totalement furieux et incapable de feindre le sommeil plus longtemps. Cassez vous putain! Le ton est colérique, haussé et sans appel, jamais entendu auparavant de la belle. Même lorsqu’ils ne se connaissaient pas encore réellement, même quand il était en colère contre elle de laisser des squatteurs envahir la sérénité de ses grands parents. Jamais il n’avait été aussi froid envers elle, envers Andrea au passage. Toujours allongé, il se redresse enfin pour fixer la surnaturelle droit dans les yeux. J’suis sérieux Ness dégage. J’ai pas envie d’t’avoir dans les pattes là. Injuste cruauté dictée par une colère et une fierté qui ne veulent pas le laisser tranquille. Ego touché tout autant que son coeur, alors qu’elle a préféré s’isoler plutôt que de venir gérer son problème avec lui. Pointe de jalousie inédite aussi, alors que Andrea semble déjà au courant, avant lui. Cette impression ne le quitte pas… elle n’a pas confiance en lui… Pas assez en tout cas pour l’aider dans cette situation, dont il ne connaît encore rien. J’ai pas la patience là. Qu’il prévient, alors que sa colère s’accentue encore et bouillonne contre ses tempes, prête à exploser.

juin 2022
—    @Snefrid Myklebust  & @Ash Monroe

Mon regard est fixé sur la fenêtre, les paysages qui défilent. Mon regard est morne, perdu dans quelques souvenirs. Je me sentais apaisé, c'était illusoire comparé à l'effet que me faisais Aznar. Mais ce serait suffisant pour la journée. Un bon bédo le soir avant de dormir pour que l'esprit frôle l'inconscience afin de sombrer... Et j'pourrais passer une journée seul, sans personne pour me prendre par la main. ça m'faisais rire, les gens qui pensaient que j'étais comme ça juste pour attirer l'attention. Les nuits d'insomnies c'était pas pour faire "mon intéressant". Mes parents étaient ce genre de personnes, qui pensaient que j'faisais tout ça pour attirer leur attention. Il n'en est rien. Elle parle, elle a cet air de p'tit chiot triste qui se rend compte qu'il a fait une boulette. J'agite la main.

"T'es occupée, et t'avais tes propres démons à gérer. ça m'empêche pas de cavaler, ça me prend juste plus de temps. Mais c'est pas forcément un mal." Et j'oublierai jamais s'que j'ai vu... J'oublierai jamais ces deux orbes enflammés nous fixant dans le cœur de la terre, ces dents si blanches, qui en un éclair se saisissent d'une vie juste sous mon nez. Je prie toustes les divinités que je connais. De tout mon coeur, pour que ces créatures, jamais, ne puisse inspirer l'air frai, loin des entrailles de la terre, à la surface. Mes doigts s'accrochent au tissu qui passe à ma portée. Et je change de sujet. Sa paume chaude sur ma peau. Je me souviens lorsque nos âmes étaient encore jumelé, la froideur de son esprit m'offrant un lit douillet où chasser toutes ces pensées opportunes, la chaleur de ses draps lorsque je m'y glissais. Bien que nous ayons eu quelques relations intimes, à aucun moment nous avons formés un couple. Une amitié fusionnelle, c'était ce qui nous liait tous les deux. Un petit rire m'échappe. "Oui... J'ai envie de construire quelque chose avec lui, nous verrons où ça nous mène."

Je reviens au sujet du dossier, que je finis par mettre de côté lorsque sa voix se fait sèche. Sujet sensible. Je ne sais pas comment je prendrais la nouvelle, à sa place, j'étais pas dans ses fantastiques talons, j'étais pas dans sa peau, je n'avais pas son vécu, et je n'aurais jamais la possibilité de me mettre à sa place. Alors j'me contente d'être là pour elle, c'est ma paume qui part, à son tour, se poser dans son dos, la ramenant contre moi dans une douce étreinte, une marque d'affection. "Bien."

Sortir de la voiture, se glisser jusqu'à la chambre de Ash. Je la regarde un moment. "J'ai fais une crise d'angoisse." C'était comme ça que ça avait débuté. "On va sans doute... Tous périr Ness. Aussi fabuleuxses qu'on est. Il y a un déséquilibre, quelque chose qui s'apprête à entrer dans la balance, et si les dieux nous abandonnent, que restera t-il de leurs élus ? Seront-ils grillés sur place ? Mourront-ils comme ils étaient sensés l'être, sans la renaissance offerte par les dieux ? Je ne sais pas où j'en serais dans un an. Je voulais pas... Risquer de le perdre et de passer à côté de quelque chose." Je hausse les épaules. "Alors j'me suis lancé. J'ai crocheté la serrure du bar à jeux, et je l'ai rejoint en pleine nuit, et là... Là j'ai vu la peur dans le fond de ses prunelles. La peur du regard des autres, la peur du jugement, la peur d'être blessé. Mon sublime ne peut avoir peur, pas quand je suis là pour le protéger." Le ton invitait à aucune réplique. J'étais mortellement sérieux. Et... Oh, par les sacros saints félins tirant le char de Freyja, ce que je pouvais être dangereux. "On s'est embrassés." Un sourire timide étire mon visage. "Et... Il faisait noir, mais j'ai pas eu peur. Ma cheville me lançait, mais je préférais crever que d'me reposer. C'était comme si... Quelque chose était enfin complet. Comme quand nous formions un "un" toi et moi. Et j'ai eu l'impression... Une impression de plénitude qui a transcendé l'angoisse." Même si on devait tous crever, je ne serais pas seul, jamais. Car mon âme était plus intimement lié que n'importe quoi d'autre à la sienne.

Elle ouvre la porte, et je me glisse à sa suite dans l'antre de Ash, endroit souvent exploré. J'aime bien ce garçon et j'suis heureux qu'il soit entré dans la vie de Ness. Un grognement bestial et mécontent se fait entendre du côté d'un tas de couverture. "Je crois que ton burrito est fâché." Simple constat. Qui vient vite se valider. "Moi aussi je suis content de te voir chaton." Une voix douce, alors que je reste du côté de la porte. Je pourrais aiguiser ce sentiment de colère que je perçois chez lui de par mon seul pouvoir, le laisser s'exprimer avec puissance, qu'il ne reste plus rien que l'épuisement. Mais... Ce n'était pas ma place. Je m'adosse au mur, me faisant glisser au sol, en tailleur. "Faites comme si j'étais pas là mes trésors, j'entends rien, je vois rien." Je pose mes mains sur mes oreilles, sur ma bouche, puis, pour finir, sur mes yeux. Petit mime des singes de la sagesse. "Néanmoins, j'vous conseille de régler vos comptes assez vite et d'vider votre sac, j'vous ai dis que j'avais eu une formation de médiateur ? Bon... C'était juste deux heures mais... Heeeey, c'est un début." Et je me la boucle finalement, prêt à esquiver un regard assassin, voir même un coussin lancé en pleine gueule.

juin 2022
—  @Andrea Helland & @Ash Monroe

Drea m'énonce son histoire, ce tournant important dans sa vie qu'il était temps qu'il prenne. Je me plonge toute entière à son écoute. Les problèmes de l'instant, oubliés brièvement. L'imaginaire reconstitue la scène, me fait me glisser dans sa peau comme j'en ai eu coutume, à ressentir ces émotions si familières et lointaines. Ses questions fondamentales, sur notre place dans ce monde, la finalité de notre existence, elles n'attendent pas particulièrement de réponse. Ces angoisses présentes depuis des lustres, ancrées en lui, ne sont qu'exacerbées par les récents événements. Comme à l'ancien temps, j'aimerais pouvoir avaler cette négativité et l'apaiser d'une simple pensée. Je ne m'en sens que plus soulagée de constater qu'Aznar et lui se complètent parfaitement. Je souris doucement à sa conclusion, au rappel de notre unité. < Evidence de comparer votre lien au nôtre, toutefois ce un que tu évoques est bien plus intense et différent, j'en suis convaincue. Comme… > …avec Ash et moi. Je garde ces mots sous silence, qui me font durement reprendre pieds avec la réalité et ce qui m'attend derrière cette porte que j'ouvre, bravant nos accords. Le rappel de ces mots prononcés, en présentant à Ash sa chambre au Baby Sugar. Unique fois où j'y ai mis les pieds. Cet espace est le tiens seul. Ma chambre est la nôtre.

M'installant sur le canapé, j'ignore le grognement de notre hôte et constate Drea resté à l'entrée, assis adossé au mur. Burrito, chaton… Si la douceur sincère de ces petits noms iraient en d'autres circonstances à me faire sourire, présentement ils ne font que me tendre un peu plus. Parfaitement consciente sans l'avoir dans mon crâne que ca ne va pas apaiser Ash, au contraire. Un frisson me parcourt, à entendre cette voix soudainement si peu familière. Être dans cette même pièce que lui sans lui, ça me rend incroyablement inconfortable, accentue cette froideur que j'arbore surtout en masque pour me protéger. Il n'y a qu'à observer les billes noires de mon sublime pour comprendre à quel point je l'ai blessé ; une indifférence pourtant dressée en bouclier. Un œil jeté en direction de Drea, j'aurais aimé qu'il s'installe à mes côtés, rompt cette solitude que je me suis imposée. Plus que ses mots, son simple contact en soutien dans cette situation que j'ai créé malgré moi. Et je déteste ce sentiment qui m'envahit, faiblesse refusant d'être divulguée, rarement touchée en plein coeur.

Force tranquille, ma colère se fait silencieuse, elle s'insinue en moi autant que cette incertitude. Ce changement de ma situation est un parfait imprévu ; un frère. Un pan de ma vie archivé depuis bien longtemps qui s'ouvre de nouveau, sans la moindre idée de comment y réagir, incertaine même de l'accepter simplement. Tout se bouscule là-haut, dans mon crâne. Mon esprit fermé tel un reflex vital, c'est autant pour me protéger moi que Ash. De mauvaise foi, je préfère me dire que c'est pour ne pas être parasitée par ses pensées, ses ressentis. Une coupure nette et franche. Je n'ai surtout pas la volonté qu'il me voit ainsi. Faible, tourmentée par le passé, en perte de contrôle. Contenance encore maintenue, j'ai la sensation qu'elle m'échappe du bout des doigts plus le temps défile. Si être confrontée à Ash est bien nécessaire, je n'ai pas envie de me prendre sa colère justifiée en pleine face. Pour la première fois je romps tous nos accords, agis égoïstement, le mets à l'écart de la plus horrible des manières. D'autant plus, très peu encline à rétablir notre lien, convaincue que ca n'irait qu'ajouter de l'huile sur le feu.

Assise sur son canapé, je persiste à y rester. Supporte l'inconfort de mes habits de la veille, de ce maquillage encore sur ma peau, de mes rituels passés à la trappe. Mon orgueil et ma fierté m'empêchent de faire volte-face, de me rendre auprès de Ash dans un réconfort que je suis pour une fois incapable de lui apporter. < Tout ne tourne pas autour de toi Ashley. Tu vas la trouver, la patience. D'accord ? > Le ton se fait faussement interrogatif. Surtout particulièrement sec. Le sous-entendu que si lui rejette ma présence, moi j'ai particulièrement besoin de la sienne. Qu'importe les apparences ou ses désirs. < Je sais être à l'initiative de ta colère, > lui dis-je sans une once de désolation dans la voix. < Soit tu éclates une bonne fois, soit tu la ravales. Je ne compte pas rétablir notre lien tant que tu ne te seras pas apaisé, aussi désagréable que ce soit pour nous. > Cette rupture avec mon sublime, Drea et Ash confondus, c'est bien une première. Que je regrette, qui m'était sûrement nécessaire aussi.

< Le cabinet de Drea a été missionné sur une enquête me concernant. Tout est là. > Le pied en l'air de mes jambes croisées pointe brièvement cette enveloppe balancée plus tôt sur la table basse. Mon corps retrouve bien vite son immobilité parfaite, mains croisées sur mes cuisses. Un des nombreux moyens dont j'use pour me canaliser, jusqu'à retrouver toute contenance. L'envie absente de lire ce dossier de recherches, tout ce qu'il peut soulever de mon histoire, connue et inconnue. Si la curiosité me qualifie bien, elle est actuellement complètement éteinte.

Les propos d’Andrea devraient l’agacer encore plus mais l’effet inverse semble se produire sur l’ours mal léché. Ces quelques petits noms qu’il est incapable de supporter venant d’autres mais qu’il apprécie finalement entre ses lèvres. L’homme grogne une fois encore avant de repousser violemment les couvertures pour se lever, enfiler un pantalon au passage et se tourner vers les deux intrus. Le regard enveloppe un peu tendrement l’ancien.ne sublime mais celui posé sur Ness est bref, noir et plus froid que jamais. Jamais il n’a pu lui lancer ce genre de regard auparavant mais là, il ne sait pas comment la regarder autrement. Peut être que si elle n’était pas arrivée en conquérante dans sa chambre, il aurait eu une autre réaction mais là, ses réactions sont épidermiques, impulsives. Même s’il a eu toute sa nuit blanche pour réfléchir, lui donner des raisons, s’expliquer cette coupure nette, il semble incapable de rationnalité. La belle est là, dans ses quartiers et lui il se montre odieux parce que ce n’est pas que son cœur qui est blessé là, mais tout autant son égo ainsi que sa fierté. Cet affreux mélange qui le pousse aux pires propos. Garde le. Si c’est pour qu’tu t’en débarrasses dès qu’ça t’soule! Les mots dépassent sa pensée bien sûr mais il ne les regrette pas pour autant.

Cette relation censée être fusionnelle réduite à l'état d'imposture par ce simple lien coupé, il s’enfonce dans cette colère dont il ne semble pas pouvoir sortir. Tu brises nos règles, tu brises notre lien… et mon cœur au passage ces mots qu’il ne dit pas mais s’exprime dans son regard, qu’il dissimule aussi sec en détournant le regard.  T’attends à ce que j‘t'accueille avec les bras ouverts et la bouche en cœur et t’sais quoi? Tout tourne pas autour de toi non plus. T’avais pas b’soin d’moi hier? Et bah t’as pas b’soin d’moi aujourd’hui! Butée tête de mule blessée, qui ne parvient pas à passer outre l’affront de cette coupure nette et sans bavure, douloureusement implacable.

Le silence qui l’entoure toujours, qu’elle ne souhaite briser que de sa voix et paroles qui ne ressemblent en rien à des excuses. Elle veut de lui, à l’instant, comme s’il n’avait pas voix au chapitre. Simple objet dans sa vie, accessoire dont elle s’affuble quand elle en a besoin. Navré d’t’imposer ça Drea. Excuses qu’il balance dans un grognement alors que ses yeux viennent se poser sur le dossier qui traîne désormais sur sa table, la curiosité est là mais il ne veut pas s’abaisser à la laisser décider de tout pour lui. Plusieurs secondes il observe les pages reliées, avant de finalement détourner le regard, croiser les bras pour s’avancer vers sa fenêtre et regarder au dehors, le regard vague, triste alors qu’il est beaucoup trop touché par ce qui est en train de se produire, mais surtout incapable de réellement exprimer ce qu’il a sur le coeur, sans pour autant sembler ridicule.

juin 2022
—    @Snefrid Myklebust  & @Ash Monroe

Parfois, tirer la couverture à soi, c'est permettre à l'autre une ouverture, entrebâiller une petite porte pour permettre à son vis à vis de s'évader de la situation actuelle, lui tendre la main et le guider loin de ses problèmes. C'était exactement ce que je faisais. Emplissant l'espace de paroles, longeant des couloirs beaucoup trop connus. La tête haute, fier. Du moins c'était l'impression que je voulais donner. Ma main effleure doucement la sienne.

"On va voir pour arranger les choses avec Ash, on va faire ce qu'il faut, j'suis là." Et finalement, la porte s'ouvre. Tout se met en place, le jeune homme d'abord camouflé dans son tas de couverture, comme si cela allait servir de bouclier face au monde. Permettre de camoufler sa blessure. Car... C'est de cela qu'il s'agit. Et Ness vient enfoncer le clou, sans doute seule défense qu'elle connaisse. La femme peut être sèche, autant qu'elle peut être aussi douce qu'un chamallow. La tension dans l'air est à couper au couteau. L'air en devient presque irrespirable. Mon regard se pose sur l'un, puis sur l'autre. Un sourire désolé sur la bouille, je me glisse jusqu'au coin cuisine, murmurant un "Tu permet mon chou ?" à l'adresse de Ash. Mon ton est doux, j'ouvre les placards pour sortir trois tasses, mettre l'eau à chauffer et préparer des thés. Que faire d'autre dans une intimité, une dispute qui ne nous appartient pas ? Je sens la peine dans la voix de Ash, la colère et l'égarement dans celle de Ness. Spectateur incertain, je lâche quelques sachets de tisanes dans nos thés, de la camomille pour apaiser les esprits les plus échaudés, me glissant jusqu'à Ashley pour lui tendre la tasse et poser une main sur son avant bras. Il y a, entre nous, une tendresse certaine. Sans doute du fait du lien que nous avions et avons partagés tous les deux avec Ness. Je murmure à l'oreille de Ashley, pour lui seul. "Je peux t'aider à exprimer ce que tu ne peux pas, trésor, mais je ne suis pas sûr que c'est ce que tu veuilles. Parfois ça fait mal... C'est les relations humaines qui sont comme ça, mais rappelle toi ce que tu m'as dis. Rappelle toi où tu serais sans ce lien, et... Oh que ça fait du bien d'avoir une âme liée à la sienne." Petite caresse glissée sur sa joue, juste le temps d'un battement de coeur. Dans la caste... Nous avons toujours été tactiles. C'était une manière de nous sentir proches. Prenant les deux autres tasses, je prend place juste à côté de Ness. Regardant l'un l'autre, tour à tour. "Je peux... Faire exploser vos émotions, les rendre si vives que vous n'aurez d'autre choix de les exprimer. De hurler jusqu'à ce que la colère disparaisse, de pleurer jusqu'à ce que la peine se transforme en épuisement si vous voulez. Mais... Ce n'est pas une bénédiction." Je pousse un petit soupir, sirotant un peu de mon infusion. "Maintenant arrêtez tout de suite mes trésors, le caprice ici c'est moi et personne d'autre." Je caresse le dos de Ness dans un geste de sollicitude. "Vous n'allez pas rester brouillés à vie non ? J'vais faire comment moi après, faut pas qu'je dise à p'pa que j'ai vu m'man et inversement ?!" Un sourire de sale gosse vient étirer mes traits. Je glisse un regard vers l'un, et vers l'autre. "Parler d'autre chose un moment -pendant que je suis là et que je n'ai pas envie de compter les points- ce serait un bon début. Bon... Qu'y a t-il dans ce p'tit dossier, tu me diras, mon p'tit Ash ? C'est simple." Je l'ouvre. "T'as vu ? On fait les dossiers en couleurs, on lésine pas sur la qualité, c'est Muninn qui s'en occupe, elle adore ça, on essaye même d'accorder la couleur des trombones au reste." Je choppe la p'tite photo, papier glacé, c'est pas le meilleur profil du gaillard mais bon. "Lui... Figure toi que c'est le frère de Ness, ici présente. T'aurais dû entendre son ton quand elle m'a appelé. Mais bon. J'y suis pour rien, c'est un de mes collaborateurs qui s'est occupé de l'affaire." Je fais tourner la petite photo entre mes doigts. "Boom, révélation, pression, émotion forte, j'imagine, et une p'tite coupure entre vous."

Je me tourne vers Ness. "Bon, maintenant tu peux m'étriper si tu veux, ma douce, parce que j'ai tout raconté, mais bon... J'veux bien rester dans le coin à bouffer du pop corn en vous regardant vous envoyer des fions, mais j'trouvais ça dommage. En plus j'crois que j'ai dévalisé la réserve de gâteaux de notre grumpy burrito préféré la dernière fois que je suis venu. Promis mon grand, la prochaine fois je viens les bras chargés !" Mes pieds, croisés au niveau de mes chevilles, s'agitent dans tous les sens, signe de l'activité qui siégeais sous ma caboche. Je baisse les yeux sur mes mains, qui se tordent doucement mais sûrement. "J'aime pas vous savoir fâchés. Et j'suis désolé si je prend une place que je devrais pas prendre mais... Vous comptez tous les deux énormément pour moi. Plus que ma famille de sang. Z'êtes celle que j'ai choisi, et j'aime pas vous voir en proie à... Toutes ces douleurs. Si encore j'pouvais péter les jambes de ceux qui vous font du mal... Mais c'est pas si facile que ça." C'était une place que j'assumais, mais qui faisait ressurgir des angoisses, la dernière engueulade au coeur de laquelle j'étais, c'était l'une des NOMBREUSES qui secouaient mes parents, j'avais fini avec un bon aller retour dans la gueule lorsque j'avais ouvert la bouche.

juin 2022
—  @Andrea Helland & @Ash Monroe

Garde le. Les mots prononcés aussi tranchant qu'une lame parfaitement aiguisée, douloureux tel un poignard émoussé et rouillé par les années. Je décolore, livide, conserve mon stoïcisme pour ne pas laisser transparaître plus que l'évidence. La sensation foutrement désagréable que mon estomac remonte dans ma gorge et cette colère, qui s'insinue par le moindre de mes pores. Ma maîtrise sur notre lien s'effrite, l'envie cruelle de le submerger, le tourmenter. Je ne sais par quel miracle je réussis à me contenir. Certainement les années de pratique, à recevoir nombre d'affronts sans jamais y accorder réponse. < Mon silence a dû t'être bien désagréable pour que tes paroles soient aussi indigestes que cruelles. Mon antipathie à ton égard est à son sommet Ash, nul besoin de me préciser qu'elle est réciproque. Je n'aurai pas besoin de toi demain ni les jours à venir. > La réplique est immédiate, glaciale, dans un discours continue au sien, ne nécessitant pas une once de réflexion. Elle claque avec force. L'habitude ressurgit de ne jamais se laisser démonter, se laisser atteindre. Le bleu si clair de mes iris laisse place à un noir intense qui le foudroie, dressé tel un bouclier. Rapidement je me détourne de la vision d'Ash pour ne pas m'enfoncer dans la colère. Le regret s'insinue en moi, de perdre peu à peu le contrôle. La rancœur un sentiment méconnu, se fait puissante à l'égard du sublimé. Venant de d'autres, la dureté des mots, leur lâcheté, leur agressivité ne me ferait que l'effet d'une douce caresse. Ceci dit Ash n'est pas n'importe qui, le seul assurément pouvant m'atteindre si profondément. Douleur et perturbation si intenses que la nouvelle d'un frère est relayée au second plan. Se verrait presque oubliée, si le dossier n'étais pas présent sur la table basse. Qu'importe que j'en sois la source, je n'ai nul envie de trouver des justifications au comportement d'Ashley. Si hier j'avais besoin de me retrouver plus seule que jamais, aujourd'hui j'avais besoin de lui. Qu'il me retourne ce que je lui ai toujours offert sans la moindre retenue : patience et affection.

Andrea parti nous préparer des tisanes ; s'occuper, surtout, pour ne pas avoir à subir notre échange. Le voir revenir auprès d'Ash m'attendrie imperceptiblement. La situation ne serait pas celle qu'elle est, un sourire heureux se glisserait sur mes lèvres, de les voir si proches. De constater cette famille formée... craquelée par cette discorde. L'ancien sublime s'installe à mes côtés ; sa proximité, son contact me fait du bien, la sensation de pouvoir m'y accrocher pour ne pas me perdre plus loin dans les ressentiments. Il nous présente son don comme une potentielle solution, à laquelle j'ai préféré ne jamais avoir recours. Peu certaine qu'elle me soit bénéfique, vu tout ce qui peut être enfoui en moi. < Non Drea, je te remercie. Je crois qu'il vaut mieux que chacun retrouve son individualité, quelques temps. > Malgré moi, la froideur ne déshabite pas ma voix et je saisis un instant sa main, sûrement trop fort pour que s'en soit agréable. < Je suis désolée chou. Tu n'auras jamais à agir différemment avec nous. > Le petit nom, rare, brise à peine le ton de ma voix. L'évocation du maman et papa faisant écho à tout ce que je sais de son passé, et que je n'ai pour rien au monde envie de lui faire revivre.

Appréciatrice de ne plus avoir à prononcer un mot, je laisse Drea mener la danse. Mes billes se posent sur Ash, inexorablement attirées. Lien atténué mais jamais brisé, j'arrive à percevoir sa tristesse et referme bien vite cette porte entrouverte. Sentir sa peine fait monter ma colère et ce besoin de distance. L'envie aussi écœurante que ses mots, de sectionner notre lien. Pour la première fois de mon existence, la sublimation m'est difficile à supporter, à mener. Jusqu'à remettre en question ce choix, de m'être liée si intimement à une autre âme. Et le remord, de ces horribles pensées… Un maelstrom de sentiments que je ne maitrise plus, qui sont tempêtes dans mon esprit et que la neutralité de mes traits ne peut tromper ces deux êtres qui me sont les plus chers.

La photo en main de celui auquel je suis liée par le sang, je détourne le regard, pas la moindre envie de revoir ce visage. Je me fige un peu plus, si cela est encore possible, à entendre le qualificatif. La douceur d'Andrea est aussi agréable qu'elle fait naître en moi un besoin primaire de l'étriper. Je crois qu'il est clair, à présent, que je déraille. Comme s'il lisait en moi, Drea prononce ce que je dissimule et réussis à me tirer un sourire. Du moins, un coin de mes lèvres se redresse furtivement. Une main bienveillante posée sur les siennes pour apaiser l'anxiété naissante. < Tu ne fais que prendre la place qui t'appartiendra toujours. > A nos côtés. La conviction que le mal qui nous sépare, Ash et moi, n'ira jamais à le blesser lui. La volonté de ne jamais laisser cela arriver. Apaisée par les mots, la présence d'Andrea, cela ne suffira pas à effacer ce qui vient de se produire. Ash trop important pour simplement oublier, l'âme trop remuée.

Le corps reprenant du mouvement, je me redresse finalement, de nouveau le besoin d'air. < Je n'ai pas la volonté de connaître les détails de ce dossier. Bien qu'il soit évident que je ne puisse ignorer longtemps l'existence de cet homme. Fais-lui la lecture, puisqu'il en semble incapable. > Désobligeante. Est-ce nécessaire ? Je n'en cherche pas la réponse. Le lui désignant évidemment Ash, s'étant refusé à parcourir le dossier. Qu'il croit ce qu'il souhaite, de mes besoins. Aussi déchiré que nous sommes, notre lien ne peut être véritablement brisé. Tout comme cette confiance aveugle depuis longtemps existante, bien que ses contours s'en retrouvent modifiés. J'imagine qu'il ne nous reste plus qu'à subir l'humeur massacrante de chacun. Je m'éloigne vers ce qui m'apparaît être la penderie de mon sublime, inconnue en ces lieux. La nécessité venue de me défaire de ma tenue de la veille pour retrouver une sensation illusoire de confort, je me déshabille et enfile un de ses tee-shirt. Au moins le vêtement n'avance aucune requête, ne donne aucun reproche, apporte seulement cette odeur si familière et réconfortante.

Le regard noir dérive et vient s’ancrer sur Andrea lorsqu’iel impose cette alliance pour aider la belle. Non pas qu’il puisse refuser de se montrer coopératif, seulement à cet instant, il n’a absolument pas envie d’entrevoir la possibilité d’être là pour elle. La rancoeur commence à l’étouffer, à étreindre cruellement son coeur, tant qu’il a l’impression d’étouffer, de ne pouvoir réfléchir correctement. L’homme n’était pas prêt à cette confrontation, à cette invasion de sa vie privée à ce moment où il en a besoin. Les mots s’impriment contre le palpitant, viennent envahir son esprit de ces piqûres empoisonnées alors qu’il n’est pas capable de les gérer. Merci… Souffle t’il néanmoins à l’adresse de l’ancien.ne sublime lorsqu’iel apporte la tasse, sans s’apaiser de ce contact qui est pourtant appréciable. Petit voile de douceur dans le tourment qui est sien, vague légère au milieu de la tempête qui explose. Surtout pas. Pas de dons, pas d’conneries surnaturelles là. J’ai juste besoin d’être seul. Le dire à voix haute lui semble impossible, il n’a pas la force de les renvoyer même s’il en meurt d’envie. Conscient déjà de dépasser les limites en se montrant aussi odieux, il a peur de la cassure qu’il pourrait provoquer à réitérer sa demande de les faire déguerpir.  

Pour une fois que j’te parle… Marmonne t’il dans sa barbe, plus pour lui que pour quelqu’un d’autre en réponse à la remarque de Ness. Il est si difficile de dire tout ce qu’il a sur le coeur, il l’est encore plus d’analyser ce qui pèse sur son âme. Drea… Il voudrait s’excuser de lea mettre dans cette position, de lea forcer à revivre des sentiments qui doivent se faire douloureux, mais il n’a pas l’impression d’avoir le droit de le faire. S’excuser alors qu’il est incapable de prononcer ces quelques mots à l’égard de la belle. Je suis désolé… Il serait tant aisé de lâcher ces trois mots, envers l’une et l’autre. Laisser derrière lui ce malentendu pour entrer dans la conversation entièrement, pour être là pour elle, pour son problème. Incapable de le faire pourtant tout en ayant conscience de dépasser les bornes.

L’explication du caprice s’en vient, les sourcils du sublime se froncent en l’entendant. Les détails ne sont pas importants, tout ce qui compte, c’est cette famille, tombée de nulle part. Un frère… Il secoue la tête, continuant à regarder son reflet dans la fenêtre en fronçant le nez. La révélation est intense, mais pas assez pour qu’il se calme, pour qu’il comprenne pourquoi elle a décidé de se couper de lui. Je t’ai racheté un paquet s’tu veux. Toujours l’même placard. Enfin il se retourne vers eux, les bras croisés, à peine apaisé des interventions toujours fraîches d’Andrea. J’aimerais bien t’voir essayer d'me péter les jambes. La douceur et la spontanéité qu’il arrive à lancer envers ellui, qu’il n’est pas capable de fournir pour Ness à cet instant.

Dualité dans son être qui le rend fou, le pousse à la fureur qu’il cache difficilement, qu’il étouffe sans savoir comment le faire réellement. Leur présence commence à le peser, même s’il ose regarder la belle, dans cette douleur qui n’exprime que dans ses yeux, en une seconde avant de se détourner de nouveau. Ca t’va bien… Qu’il balance tout de même à son égard, avant d’avancer vers Andrea pour lea prendre dans ses bras, pour apaiser ces probables angoisses qui doivent ressortir, qu’il arrive à percevoir malgré son manque de clairvoyance. Ca ne dure que quelques secondes, avant qu’il ne se détache, qu’il retourne sur son lit pour s’y installer, en tailleur, les yeux fermés. J’peux me débarrasser d’lui. Définitivement si vous voyez c’que j’veux dire. Il soupire en prononçant ces mots, sans savoir ce qu’elle attend de lui finalement…

juin 2022
—  @Andrea Helland & @Ash Monroe

Voir sa langue aussi déliée, lorsqu'il s'agit de s'adresser à Drea. Ses gestes aussi naturels que simples, à son égard tandis qu'au miens, tout semble impossible. La parole un obstacle insurmontable. La tendresse reléguée au placard. Je me mords légèrement l'intérieur de la lèvre, détruis ce sentiment d'envie et de contrariété alors que mon cœur continue de plonger dans le vide. Les voir si proches me ravirait, en d'autres circonstances. En l'instant, je n'en retire qu'un goût amer en bouche. Peut-être un peu ferreux, aussi. Une jalousie bien mal placée. La perte de l'être trop aimé finalement bien réelle.

Depuis le temps, je le lis bien, le Ash. Même sans envahir son esprit ni user d'aucunes de mes ressources. Observer ses gestes, ses iris, me suffit pour beaucoup. Des barrières se sont dressées entre nous. De son côté comme du miens. Des barrières qui n'ont jamais existé, jamais eu leur place et qui semblent pourtant nécessaires aujourd'hui pour limiter la casse. La douleur et la colère probablement réciproque, malgré ce compliment échappé. De marbre je l'ignore, un parmi tant d'autres émis par la plèbe, tandis qu'en réalité l'homme a toujours eu cette faculté de me réchauffer l'âme en quelques mots. Satané moitié qu'il représente. Il s'éloigne de nouveau vers son lit et je ne peux m'empêcher de ressentir un certain soulagement par cette distance entre nous. Sentiments contradictoires qui ne font que m'engloutir de secondes en secondes.

< Retiens toi de toute initiative. > Je lui réponds sèchement dans l'instant, loin d'avoir besoin d'une nouvelle affaire catastrophique sur les bras. < Je ne te demande rien d'autre que de répondre à tes obligations. Pour le reste, j'ai su faire sans ton existence avant, ça ne devrait pas être bien difficile aujourd'hui. > Langue de vipère rarement de sortie, je pique volontairement à vif. Tu le sais, Ness, que tu es au bord du mensonge. Tu le sais qu'il t'est devenu indispensable à bien des égards. L'homme n'a pas besoin de découvrir l'étendue de ta dépendance, t'as déjà besoin de la découvrir toi-même. < Pour ma part je me retire. De toute évidence, je suis de trop. > Je conclus finalement, implacable. Les nouveaux termes de notre alliance me paraissent suffisamment bien définis. Pour le reste, les comportements parlent d'eux-mêmes et le temps fera son affaire. A voir s'il sera avec ou contre nous… Le regard bref posé sur Ash, incapable de le soutenir, je salue d'un signe Drea et m'élance vers la porte. Le dossier de ce frère nouveau abandonné sur la table tout comme mes vêtements de la veille, nul besoin qu'il prenne de la place dans mes affaires. Je me dirige vers mes appartements non loin, implose dès l'isolement retrouvé, le numéro de Wighard déjà composé. Et le visage, enfoui dans ce tee-shirt qui est sien, à défaut de l'avoir lui tout entier.